fr_marie-philippe
TOC, TOC … Désolé de vous réveiller de si bon matin mais nous avons mieux à faire ! Et si nous allions toquer à la porte de Marie et de Joseph ?

TOC, TOC … Commençons par toquer à la porte de Bethléem. Elle mène à l’habitat des bêtes. Le tableau n’est pas idyllique, Joseph nettoyant le sol après le passage des brebis, Marie réchauffant l’enfant en frottant ses petites mains. Dans ce village inconnu, ils avaient quémandé meilleur abri et les voici auprès des animaux, cachés, au moins, du regard des hommes. Ils ont bien du courage, dirait-on aujourd’hui. Ils ont davantage, ils ont la foi. De l’ange, Marie avait entendu : L’être saint qui naitra de toi sera appelé Fils de Dieu et Joseph : Ce qui a été engendré en Marie, ton épouse, vient de l’Esprit Saint. Ne crains pas de la prendre chez toi. Et tous deux ont répondu Fiat ; qu’il soit fait chez nous la volonté du Seigneur, même dans les épreuves à venir, même dans cette étable. Qui d’entre nous n’aurait été atteint de doute ou de désespoir dans cette situation ? Pourtant, à la crèche, tout paraît si doux. Douceur qui vient des cœurs, ancrés dans la foi. Ici, sans l’opulence qui peut cacher la pauvreté des relations, le dénuement de Bethléem montre la richesse de leur fidélité à la parole donnée et à la Parole divine. Passer la porte de Bethléem, c’est entrer dans le dénuement et la foi.

TOC, TOC … Passons à la porte de Jérusalem, immense, magnifique, d’airain étincelant. Au Temple, la Porte de Nicanor sépare le parvis des femmes juives et celui des hommes. Là se trouvent les familles et les enfants qui courent, les lépreux guéris, les ascètes qui louent le Très Haut jour et nuit. Par cette porte, chacun aperçoit le grand autel des sacrifices, élevé à cinq mètres de hauteur. Dans ce brouhaha, qui aurait repéré cette jeune femme, portant en bandoulière son nouveau-né, et son mari apportant deux tourterelles pour le sacrifice au prêtre qui se tient debout entre les deux parvis ? Et pourtant, Siméon et Anne, porteurs de l’espérance du peuple d’Israël, reconnaissent en cet enfant la Lumière de la gloire qu’il tient de son Père comme Fils unique, venant illuminer juifs et païens. Cette famille venait suivre les prescriptions de la loi pour le rachat du premier-né et pour la purification de la mère et reçoit la bénédiction divine. Bénédiction qui ne va pas sans la croix, spécialement celle de Marie : elle connaitra l’épreuve dans sa vie de famille, la perte de son époux, de son enfant. Porte de Jérusalem, par laquelle nous entrons dans l’espérance au cœur de nos épreuves et qui nous invite à donner en nos familles soutien et pardon au milieu des souffrances de ce temps présent.

TOC, TOC … reste cette dernière porte que Jésus connait si bien, la porte de Nazareth. Cette porte l’a vu se fortifier à la manière des hommes et se remplir de sagesse par sa nature divine. En effet, la divinité du Christ comblait au fur et à mesure sa nature humaine et la sagesse qui vient du Père se manifestait de plus en plus dans son humanité. Oui, Jésus a vécu parmi nous, jouant quand il était enfant, travaillant comme charpentier, acculé au ménage, à la cuisine, à la vaisselle, aux tâches quotidiennes au sein de sa famille, avec Marie et Joseph. Cette vie cachée, sans éclat extérieur, montre ce qui peut faire l’unité profonde de la famille : l’union à Dieu. Au fond, la charité. Si nous ne cherchons pas en famille l’intimité de Dieu, l’amitié avec Jésus, si le cœur de notre vie familiale ne trouve pas en lui son centre, nous le sentons, nous le savons, les passions et les divisions viendront. Car la paix véritable ne peut venir que du Roi de Paix. Car l’amour véritable ne peut venir que si l’on puise à la source. Porte de Nazareth, porte de l’amour quotidien, de Dieu vivant au cœur de la maison.

Chers frères, comme la sainte Famille, cherchons dans notre dénuement et nos pauvretés que nous connaissons si bien la foi, dans la croix, l’espérance, dans le quotidien, l’amour. Nous savons que le péché est entré dans le monde en divisant la première famille humaine, que la tentation de domination affecte les relations de nos familles, tant humaines que religieuses, que nous nous en restons souvent la question des disciples au soir de la Passion : Qui est le plus grand ? Qui a raison et doit avoir le dernier mot ? Qui a le pouvoir ? Et nous sentons que cela ne sied pas à notre baptême. Car Dieu ne nous a donné qu’un seul pouvoir qui vaille : le pouvoir de devenir ses enfants. C’est en tant qu’enfants de Dieu, unis par l’Esprit, que les chrétiens sont allés en famille sur la voie de la conversion, refusant de tuer les nourrissons, voyant dans leur conjoint un frère ou une sœur, s’unissant dans un consentement mutuel et fidèle. Dieu a fait de la famille un chemin de sainteté que Lui-même a parcouru.

Il n’est pas sans croix. Il n’est pas sans échecs et sans blessures. Il n’est pas sans espérance, comme celle d’Abraham, malgré son grand âge, comme Siméon et Anne malgré leur longue attente. Chacun de nous, quel que soit son état de vie ou l’état de sa vie familiale, a un chemin possible avec le Christ, en qui seul nous pouvons trouver la force d’aimer, de pardonner et d’être pardonné, de continuer tout simplement.

Et nous découvrons que, quoi qu’il arrive, nous avons des frères et des sœurs ; ils sont autour de nous. Aussi, je propose une action toute simple : prier durant cette messe pour la personne, le frère ou la sœur qui est assis auprès de vous et que vous ne connaissez pas. Repérez-la bien. Et saluez-la après. C’est en voyant l’amour que vous avez les uns pour les autres que le monde croira dit le Seigneur.

TOC, TOC, TOC … n’entendez-vous pas ? Dieu est la porte de votre cœur, ouvrez, laissez-Le entrer, soyez les vrais fils du Père, les frères et sœurs aimants de Jésus. Vous êtes de sa famille.