Comme un grain de moutarde

par 16 Oct 20222022, Homélies, Temps Ordinaire

fr_denis
En ces jours-là, le peuple marchait à travers le désert. Les Amalécites survinrent et les attaquèrent. Ainsi va l’histoire, notre histoire ! Le peuple d’Israël marcha 40 ans dans le désert pour arriver dans la Terre promise par Dieu, le temps d’une génération, le temps d’une vie entière. Nous aussi nous marchons jour après jour, pèlerins que nous sommes, quand en chemin surviennent les épreuves de la vie, la fatigue, le découragement ; et puis tous ces vents contraires contre lesquels nous devons lutter, ces attaques du mal et du Malin qui entravent notre marche et nous empêchent d’avancer. Ils sont ces ennemis bien réels dont la Bible nous parle à sa manière, parfois forts, puissants ; il faut alors mobiliser nos énergies et mener le combat comme le peuple d’Israël dut le faire contre les Amalécites.

Mais, nous dit le texte de l’Exode, pour que le peuple pût gagner la victoire et continuer sa route, il fallait que Moïse tînt le bâton de Dieu à la main et gravît la montagne. Il fallait que là sur la montagne Moïse étendît les mains sans relâche vers le ciel, comme le Christ, sur le mont Golgotha : les mains étendues sur le bois de la Croix, Jésus fit monter vers le Père une prière incessante pour la vie et le salut du monde.

Pendant que le peuple se bat sous la direction de Josué dans la plaine, Moïse sur la montagne prie de toute son âme. Le combattant et le priant s’unissent et se complètent. Si Moïse abandonne son poste de prière, Josué perd ses moyens. S’il fatigue, il lui faut de l’aide pour le soutenir. On ne peut dire plus clairement que, s’il faut notre participation, c’est Dieu qui agit, qui combat avec nous et pour nous.

C’est pourquoi le psalmiste nous invite précisément à lever les yeux vers les monts parce que c’est de là que nous viendra le secours dont nous avons besoin : Le secours me viendra du Seigneur qui a fait le ciel et la terre. Le Seigneur te gardera de tout mal, il gardera ta vie, au départ, au retour, maintenant et à jamais.

Forts de cette promesse, nous savons que notre vie est entre les mains de Dieu, il faut tenir maintenant fermes dans la foi et dans la prière pendant notre marche à travers le désert, dans les épreuves et l’adversité, dans les rudes combats de l’existence. Le risque intérieur du doute et de la lassitude peut nous guetter. Pour ne pas s’étioler et disparaître la foi a besoin de souffle, de respiration, et la respiration de la foi c’est la prière. Il faut prier sans cesse nous dit Jésus, jusqu’à importuner.

Persévérer dans la prière est le signe d’une foi vraie. Le Jour de Dieu, l’avènement du Fils de l’Homme semble tarder à venir. Notre espérance est mise à rude épreuve, l’attente éprouve la foi. Tenir bon en nous soutenant mutuellement, voilà ce qui nous est  demandé comme à Moïse. La réponse de Dieu ne viendra qu’au coucher du soleil.

Soyons aussi tenaces que cette veuve obstinée qui n’a pas hésité à crier, à clamer avec insistance son bon droit jusqu’à faire capituler un juge inique et impie qui ne voulait rien entendre. La prière est un cri, elle est un acte de foi, une confiance folle en Celui qui peut et qui veut nous sauver. Cette prière insistante exprime notre foi, ranime notre espérance, vivifie notre charité.

Tenons bon, tenons à la Parole de Dieu, la Parole nous tiendra. Elle est utile pour enseigner, dénoncer le mal, éduquer dans la justice, faire toute sorte de bien. Je t’en conjure, insiste l’apôtre Paul, proclame la Parole, interviens à temps et à contretemps, dénonce la mal, fais des reproches, encourage, toujours avec patience et souci d’instruire. L’Ecriture, toute l’Ecriture, lue, entendue,  ruminée, proclamée, nous tient fermes dans la foi.

Il faut y croire, fermement ! Si seulement, dit Jésus, vous aviez de la foi gros comme un grain de moutarde, vous pourriez déplacer des montagnes, envoyer des arbres se planter dans la mer, et la mer deviendrait une sorte de jardin, le monde deviendrait plus humain. Les apôtres ont pu en mesurer l’enjeu, eux qui demandent au Seigneur dans une prière fervente : Augmente en nous la foi.

L’évangile d’aujourd’hui nous laisse sur une question de Jésus : Le Fils de l’Homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ? La foi teindra-t-elle jusqu’au bout quand la mer est de plus en plus agitée, quand les forces du mal et la violence semblent enrayer toujours plus la bonne marche de l’humanité, quand sont légion les juges qui ne craignent pas Dieu et ne respectent pas les hommes ?

Jésus nous met ici en garde : si vous n’êtes pas vigilants, vous aurez cessé de croire. Les Chrétiens, ceux du temps du Christ, comme ceux d’aujourd’hui, sont donc invités à ne pas baisser les bras. Croire, c’est refuser de baisser les bras. Jésus sait bien que, dès le matin de sa Résurrection, ce premier matin de la venue du Fils de l’homme et jusqu’à sa venue totale et définitive, la foi sera toujours un combat, une épreuve d’endurance. Il ne manquera pas d’oiseaux de malheur pour semer le doute, il ne manquera pas de maîtres du soupçon. Cette attente du Royaume paraît tellement interminable… Dieu est-il vraiment au milieu de nous ?

L’exemple évangélique de cette pauvre veuve vient à point nommé : nous sommes aussi démunis qu’elle ; tâchons d’être aussi obstinés.

Amen