La prise d’habit

Si les novices reçoivent l’habit de l’Ordre dès le premier jour, ce n’est pas neutre. Ils sont invités à entrer tout de suite dans la peau d’un religieux qu’ils ne sont pas encore. La mue, comme il est normal, commence par la peau. La peau du visage de Moïse rayonnait de lumière (Ex 34, 29 sq.). Le reste s’en suit, du plus extérieur au plus intérieur, de l’apparent à l’invisible, de l’explicable au plus mystérieux. Le novice doit entrer dans les mœurs des religieux, qui ne sont pas et ne doivent pas être les mœurs du monde. Il y a des coutumes, des traits et une part de folklore, comme dans tout groupe vivant et qui fonctionne bien. Il ne s’agit pas seulement de les connaître, mais de les adopter par ce mimétisme qui marque le premier temps de toute éducation, de toute transmission, de toute « tradition ».

Faire partie d’une histoire

En étudiant l’histoire de cet ordre qui devient le sien, le novice entre dans cette histoire, qu’il le veuille ou non, il fait déjà partie de cette histoire. Son nom figure dans le registre des prises d’habit qui garde la trace de tous ceux qui ont été admis au noviciat, n’y seraient-ils restés qu’un jour. Cette histoire n’est plus pour lui celle des autres, que naguère il regardait avec envie, de l’extérieur, mais son histoire. Et voilà que son histoire s’inscrit dans celle des patriarches fondateurs perdus dans la nuit des temps et pourtant si proches, dans celle de toutes les générations successives dont certaines laissent un souvenir mitigé, dans celle de tous les grands saints qui ont honoré l’Ordre et l’Église, et qu’on désire tant imiter, celle aussi de cette Inquisition qu’on ne cesse de reprocher à l’Ordre et que le novice se voit contraint d’assumer à la façon d’un péché originel, dans celle aussi de l’histoire récente dont il ne se sent pas forcément solidaire mais dont il doit tirer des enseignements réalistes.

Lire la Parole de Dieu

En lisant la Bible dans son intégralité, le novice commence à se laisser pétrir par cette Révélation qui passe par une (et des) histoire(s), par un message prophétique et surtout par une écriture qui a gardé la force et la vitalité d’une parole. Le novice en lisant la Bible ne fait pas que nourrir son âme, il prend contact avec son « instrument de travail », celui qu’il doit parfaitement maîtriser et dont il devra rendre compte tous les jours de sa vie…

Et dans la tradition monastique reprise par saint Dominique, on incite le novice qui le peut à apprendre par cœur un livre du Nouveau Testament. Cet investissement restera pour lui comme un trésor précieux dans lequel le futur religieux viendra puiser toujours avec profit, tant pour sa prière, que pour sa prédication. Il entre ainsi dans cette contemplation de la Parole de Dieu qui est la raison d’être de l’Ordre des Prêcheurs. Il acquiert la base sur laquelle est déjà fondée toute sa vie. Ce n’est pas un « moyen » comme si la Bible était un outil à utiliser pour la prédication. Il entre en contact avec cette Parole de Dieu qui, passant par lui, sera livrée aux hommes comme Parole de Dieu. Cette première étape sera enfouie par la suite sous une masse d’autres acquisitions. Mais elle est indispensable. II serait bien imprudent de s’en dispenser.

Étudier la vie religieuse

La théologie de la vie religieuse qu’il étudie au noviciat va permettre au novice d’y voir plus clair dans le choix qu’il veut faire. Il va s’engager par vœu à mener une vie bien particulière. Il ne peut la connaître à l’avance, pas plus qu’il n’est possible pour quiconque de savoir à l’avance s’il sera un bon père de famille. Cela ne peut s’expérimenter par simulation. Du moins le novice doit-il savoir dans quoi et à quoi il s’engage. Une réflexion comparée sur les divers états de vie consacrée dans l’Église est indispensable dès le départ pour ne pas véhiculer toute sa vie des aigreurs, des regrets ou des équivoques dont parfois on ne se relève pas. Autre la vie du prêtre séculier attaché à son diocèse et inscrit dans le presbyterium de l’évêque, autre la vie religieuse active à qui sont assignées des œuvres de charité, autre la vie religieuse contemplative qui a pour vocation l’opus Dei sans visée ad extra. Autre la vie qui mixe les deux, pour qui la contemplation est le terreau de sa prédication. Et dans cette forme-là, il y a une infinie variété de congrégations, sociétés et instituts. Il est important d’avoir des idées claires et justes. Ne serait-ce que pour susciter un accord unanime entre les générations ! La confusion n’est pas faite pour susciter les vocations. Les déclarations trop générales ne clarifient pas les choses. Il y a longtemps que l’on sait qu’il faut distinguer pour unir.

Comprendre l’esprit des Constitutions

Le noviciat doit enfin permettre à chaque jeune religieux de comprendre l’esprit des Constitutions, comme d’en connaître les mécanismes et la lettre. D’abord parce que dans la formule de vœux, le profès promet obéissance « selon la Règle de saint Augustin et les Constitutions des frères prêcheurs » (LCO 199). Et puis, dans le système très participatif qui caractérise cet ordre, il est requis de connaître les lois qui règlent la vie. Ceux qui les connaissent le mieux ont toujours une longueur d’avance. C’est la logique même du système. Là où la décision d’un abbé ou d’un supérieur est le critère, il suffit de s’en remettre à lui. Mais là où la décision dépend d’un vote communautaire, c’est la règle du jeu qui déterminera ce qu’il faut décider. On peut trouver cela un peu compliqué, mais peut-on faire autrement dans un régime « démocratique » ? C’est ce qu’on appelle maintenant « un État de droit ». Il y a des lois. Il faut les respecter. Aussi les jeunes religieux doivent-ils lutter contre la répulsion spontanée que suscite en général l’étude des lois et la nécessité de les appliquer. Dès le départ, ils apprennent où réside la source de leur liberté et de celle de leurs frères.

Cela dit, la Règle et les Constitutions ne sont pas que des textes de lois. Elles contiennent toute une réflexion spirituelle et définissent l’esprit religieux de l’Ordre des Prêcheurs. Rien n’est plus important pour définir les liens qui unissent des frères aussi divers que possible, et de plus répartis dans toutes les situations et tous les lieux géographiques.

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