Vérité et paix
Il y a ce que la péricope de ce jour ne signifie pas : non, Jésus ne justifie ni n’excuse la mésentente avec une belle-mère ! Et il y a aussi l’étonnement et les questions : comment, en quoi, pourquoi le Prince de la paix, le Messie de Dieu, le Verbe éternel fait chair pour porter la réconciliation générale avec Dieu et mettre fin à la « grande guerre » avec Lui, selon l’image de sainte Catherine de Sienne, peut-Il être le facteur de division, jusque dans une famille, que Jésus présente à des disciples que l’on devine aisément décontenancés à une telle annonce, alors qu’Il est en train de les enseigner sur le Royaume ? Alors que les anges innombrables, au moment de Sa naissance, proclamaient la paix sur la terre aux hommes que Dieu aime, voici que le Seigneur Jésus, annonçant de grands signes, promettant aux Siens la persécution, commençant à annoncer aussi Sa Passion, déclare ouvert par Sa venue un temps de division, et voici des phrases que ni les disciples présents, ni nous-mêmes n’aimons assurément entendre, nous qui aspirons profondément à la paix, jusqu’à l’absurde même. Certes, nous reconnaissons, dans le feu dont Il parle, et surtout dans le baptême auquel Il fait allusion, l’annonce de Sa Passion, sommet de violence et de division. Et nous nous souvenons aussi que le temps et les circonstances de Sa venue, sous la fausse apparence d’une « Paix romaine » assise sur la force violente et la contrainte injuste, sont une ère de violence et de division, dans Sa région, dans Sa propre patrie terrestre et chez Ses concitoyens, et dont Sa propre destinée, d’un point de vue humain, est une manifestation éruptive. Mais en parlant ainsi, le feu qu’évoque Jésus, celui de l’Esprit dont Il renouvellera plusieurs fois la promesse aux Siens, avant et après Sa Résurrection, ce feu brûle déjà dans Ses propos, brasier de la Parole et de la Vérité (« Je vous le dis » !), et déjà il illumine la ténèbre subie ou volontaire de l’ignorance, de l’insouciance, de la nonchalance et du péché, révélant ce qui est caché, mettant en lumière les œuvres mauvaises et éclairant l’intelligence et le cœur de l’homme sur le chemin de salut qu’Il vient en personne, en accomplissant la Loi et les Prophètes, lui ouvrir de nouveau.
Car, comme à Marie Madeleine au matin de la Résurrection, comme à certains des malades qu’Il croise ou qui viennent à Lui, Jésus commence par une question. Et ici une question dans la question : cette paix qu’Il vient troubler, interrompre, empêcher, quelle est-elle ? La question devient : quelle paix attendez-vous du Messie de Dieu ? Quelle est, selon toi, la paix que ton Seigneur vient t’apporter ? « Je vous donne ma paix, non à la manière du monde », affirme Jésus le soir de la Cène, et Il commence par le même souhait et le même don lors de Ses apparitions de Ressuscité. Voilà qui répond et fait passer une première fois la lumière tranchante de la vérité. La paix du Seigneur, la paix véritable, ce n’est même pas celle du cloître ou de l’oratoire, ni assurément celle du cimetière et d’un terme de repos après soucis, querelles et souffrances, une promesse vague d’inertie, c’est, en vérité, ici et dès maintenant et comme prémisse de la béatitude et de la vie trinitaire en plénitude, la « tranquillité de l’ordre », selon l’expression de saint Augustin abondamment reprise après lui. Elle n’est donc pas l’absence de conflits, qui est en réalité soit l’ère de la mort, soit un équilibre entre forces adverses, soit l’ambiance par nature éphémère de coalitions d’intérêts poussés par eux-mêmes à l’accaparement et à la démesure. Au contraire, pourrait-on dire, d’une part elle est profondément et authentiquement vivante car elle vit selon l’ordre vivant de Dieu, d’autre part elle est l’état des réalités ajustées à l’ordre de leur nature, sous le principe et la raison de Celui qui est l’auteur et la providence de tout, qui maintient tout dans l’existence et est l’origine et le terme de tout bien et de toute vérité. Elle suppose donc la connaissance et l’amour du vrai Dieu, la présence de Sa charité, et aussi la justice qui est à la fois sa condition et son fruit entre les hommes. Il devient alors évident que la concorde entre les hommes, où ils désirent ensemble d’un même cœur le même bien, même assise sur une vraie charité, ne suffit pas. La clé de la paix, c’est bien l’union de nous-même, du cœur « rassemblé pour qu’il te craigne » selon le Psalmiste, union avec Dieu, union en Dieu et par Dieu, de nos facultés et nos puissances que le péché originel a placées en grand désordre alors qu’il affaiblit aussi notre raison supposée ordonner nos passions. Et voilà le deuxième passage de la lumière de la vérité : Celui est le Prince de la paix, Lui qui en est le maître et le principe, comme sceptre et domaine de Sa royauté, Lui qui a fait de Sa Passion et de Sa Croix le sommet et la source de la paix véritable en Dieu, Lui vient, par Sa présence de vérité et de sainteté, en révélant le Père saint et miséricordieux, mettre au jour, d’abord le combat de la vérité et de la charité qui a marqué toute Sa vie terrestre, ensuite les manques, les faussetés, les compromissions, les ténèbres de notre vie, nous rappelant que la Terre promise par Dieu, après une longue marche dans le désert, est sanctifiée par Lui dans l’alliance avec Son Peuple au fur et à mesure que sont chassés devant Lui et devant eux tous ceux qui ne placent pas en-dessus et en premier le Dieu unique et vrai. Oui, elle dérange, la Parole, elle trouble, elle dénonce, au point que son serviteur est l’oiseau de mauvais augure, l’homme à abattre, un Jérémie, un de ces messagers porteur de mauvaises nouvelles que l’on tuait dans l’Antiquité païenne, car elle ne vainc pas le péché et le mensonge pour cohabiter et pactiser avec eux.
Mais elle est si forte, cette querelle intérieure permanente, ils semblent si lourds, les mauvaises habitudes, les péchés répétés ; il est si fatigant, ce combat, et le bras se fait lourd comme celui de Moïse contre Amaleq dans le désert. Voilà le troisième passage du feu apporté par le Christ : c’est, dans les mots de Son souhait, Sa prière pour nous. Il est venu apporter le feu de la Parole même dans la lumière de Son Evangile, qui nous enseigne quel est l’ordre de la charité, comment la charité est agissante, comment elle va jusqu’au don total, contre toute justice apparente, pour la paix véritable. Il est venu donner Son Esprit et Celui du Père, pour qu’outre Sa grâce qui nous guérit, nous élève, nous sanctifie en guérissant les blessures infligées à notre nature par le péché, nous ayons accès à la connaissance et à l’amour de Dieu, par Dieu Lui-même. Il a reçu le baptême de Sa Passion et de Sa mort, S’étant soumis en tout dès Son baptême au Jourdain, pour nous plonger avec Lui et, par Lui, prendre part à Sa victoire et vivre de Sa vie. Et comme Il veut que ce feu allume notre cœur et ce baptême le vivifie, et, par nous, le monde ! C’est Lui notre paix, puisqu’Il est notre victoire, notre justice, notre bien. Le combat est d’abord le Sien, notre part à nous est celle de la confiance et du courage tenace : celle de la foi, dont Il est le roc, l’objet et le terme. « Le Seigneur est ma lumière et mon salut, de qui aurais-je crainte ? »
Car, comme à Marie Madeleine au matin de la Résurrection, comme à certains des malades qu’Il croise ou qui viennent à Lui, Jésus commence par une question. Et ici une question dans la question : cette paix qu’Il vient troubler, interrompre, empêcher, quelle est-elle ? La question devient : quelle paix attendez-vous du Messie de Dieu ? Quelle est, selon toi, la paix que ton Seigneur vient t’apporter ? « Je vous donne ma paix, non à la manière du monde », affirme Jésus le soir de la Cène, et Il commence par le même souhait et le même don lors de Ses apparitions de Ressuscité. Voilà qui répond et fait passer une première fois la lumière tranchante de la vérité. La paix du Seigneur, la paix véritable, ce n’est même pas celle du cloître ou de l’oratoire, ni assurément celle du cimetière et d’un terme de repos après soucis, querelles et souffrances, une promesse vague d’inertie, c’est, en vérité, ici et dès maintenant et comme prémisse de la béatitude et de la vie trinitaire en plénitude, la « tranquillité de l’ordre », selon l’expression de saint Augustin abondamment reprise après lui. Elle n’est donc pas l’absence de conflits, qui est en réalité soit l’ère de la mort, soit un équilibre entre forces adverses, soit l’ambiance par nature éphémère de coalitions d’intérêts poussés par eux-mêmes à l’accaparement et à la démesure. Au contraire, pourrait-on dire, d’une part elle est profondément et authentiquement vivante car elle vit selon l’ordre vivant de Dieu, d’autre part elle est l’état des réalités ajustées à l’ordre de leur nature, sous le principe et la raison de Celui qui est l’auteur et la providence de tout, qui maintient tout dans l’existence et est l’origine et le terme de tout bien et de toute vérité. Elle suppose donc la connaissance et l’amour du vrai Dieu, la présence de Sa charité, et aussi la justice qui est à la fois sa condition et son fruit entre les hommes. Il devient alors évident que la concorde entre les hommes, où ils désirent ensemble d’un même cœur le même bien, même assise sur une vraie charité, ne suffit pas. La clé de la paix, c’est bien l’union de nous-même, du cœur « rassemblé pour qu’il te craigne » selon le Psalmiste, union avec Dieu, union en Dieu et par Dieu, de nos facultés et nos puissances que le péché originel a placées en grand désordre alors qu’il affaiblit aussi notre raison supposée ordonner nos passions. Et voilà le deuxième passage de la lumière de la vérité : Celui est le Prince de la paix, Lui qui en est le maître et le principe, comme sceptre et domaine de Sa royauté, Lui qui a fait de Sa Passion et de Sa Croix le sommet et la source de la paix véritable en Dieu, Lui vient, par Sa présence de vérité et de sainteté, en révélant le Père saint et miséricordieux, mettre au jour, d’abord le combat de la vérité et de la charité qui a marqué toute Sa vie terrestre, ensuite les manques, les faussetés, les compromissions, les ténèbres de notre vie, nous rappelant que la Terre promise par Dieu, après une longue marche dans le désert, est sanctifiée par Lui dans l’alliance avec Son Peuple au fur et à mesure que sont chassés devant Lui et devant eux tous ceux qui ne placent pas en-dessus et en premier le Dieu unique et vrai. Oui, elle dérange, la Parole, elle trouble, elle dénonce, au point que son serviteur est l’oiseau de mauvais augure, l’homme à abattre, un Jérémie, un de ces messagers porteur de mauvaises nouvelles que l’on tuait dans l’Antiquité païenne, car elle ne vainc pas le péché et le mensonge pour cohabiter et pactiser avec eux.
Mais elle est si forte, cette querelle intérieure permanente, ils semblent si lourds, les mauvaises habitudes, les péchés répétés ; il est si fatigant, ce combat, et le bras se fait lourd comme celui de Moïse contre Amaleq dans le désert. Voilà le troisième passage du feu apporté par le Christ : c’est, dans les mots de Son souhait, Sa prière pour nous. Il est venu apporter le feu de la Parole même dans la lumière de Son Evangile, qui nous enseigne quel est l’ordre de la charité, comment la charité est agissante, comment elle va jusqu’au don total, contre toute justice apparente, pour la paix véritable. Il est venu donner Son Esprit et Celui du Père, pour qu’outre Sa grâce qui nous guérit, nous élève, nous sanctifie en guérissant les blessures infligées à notre nature par le péché, nous ayons accès à la connaissance et à l’amour de Dieu, par Dieu Lui-même. Il a reçu le baptême de Sa Passion et de Sa mort, S’étant soumis en tout dès Son baptême au Jourdain, pour nous plonger avec Lui et, par Lui, prendre part à Sa victoire et vivre de Sa vie. Et comme Il veut que ce feu allume notre cœur et ce baptême le vivifie, et, par nous, le monde ! C’est Lui notre paix, puisqu’Il est notre victoire, notre justice, notre bien. Le combat est d’abord le Sien, notre part à nous est celle de la confiance et du courage tenace : celle de la foi, dont Il est le roc, l’objet et le terme. « Le Seigneur est ma lumière et mon salut, de qui aurais-je crainte ? »