Moi, je suis le chemin, la vérité, et la vie – obsèques du fr. Paul-Antonin Amargier, op

par 15 Jan 20212021

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Ap 21, Jn 14, 1-6. Je suis le chemin, la vérité, la vie.

Vers où va l’histoire? A-t-elle un sens, une direction, un but secret? Les événements contingents qui succèdent, sont-ils voués à sombrer dans le néant ou sont-ils recueillis dans une mémoire aimante qui les garde et leur donne vie?

Toute la foi chrétienne est enracinée dans l’histoire, dans l’histoire sainte. Notre Dieu n’est pas un vague idéal, ni un principe abstrait sans lien avec le cours de notre temps. Nous le confessons comme notre créateur: tout ce qui existe vient de son dessein bienveillant, tout est formé par sa Parole puissante et donc toute chose a un sens, elle est un sens porté par le Verbe de Dieu. Notre Dieu est rédempteur: il n’abandonne pas l’homme à ses errances, il vient le chercher, Dieu devient sa voie et marche lui-même avec l’homme. Dieu prend chair et se fait Emmanuel, Dieu avec nous. Sa présence éclaire notre histoire, elle devient sainte – car Dieu y habite. Enfin, notre Dieu est notre récompense. Il ne se contente pas de nous promettre tel ou tel bien, il se fait notre fin, notre but, notre béatitude. Notre histoire devient sa demeure, et demeurer avec Dieu donne sens à notre pèlerinage sur terre.

Je suis le chemin, la vérité, la vie. Quelle est cette vie? C’est une vie filiale, celle qui reconnaît en Dieu notre Père, celle qui se reçoit de Dieu et se donne à Dieu dans la prière, dans le service, dans le silence et dans les paroles. Quelle est cette vérité? Non pas une conception abstraite, mais une présence vivifiante du souffle de vie, qui fait que ce qui advient est vrai, juste, plein de vie. Quel est ce chemin? Une tension vers Dieu portée par Jésus qui nous prend et nous porte jusqu’à la demeure de Dieu.

Notre histoire devient une histoire sainte, car en elle se tisse notre amitié avec Dieu. Ou, plus exactement, c’est Dieu qui se lie avec nous par une alliance nouvelle et éternelle. En ce sens, dire de notre frère Paul qu’il était un historien revient à dire qu’il a aimé Dieu, qu’il a cherché sa présence, qu’il voulait vivre auprès de Dieu, avec Dieu, pour Dieu. Ceux qui l’ont entendu étaient souvent frappés par le fait que lorsque Paul parlait des événements du passé, ceux-ci surgissaient comme le présent. Voilà qu’un tel entre par cette porte – peu importe qu’elle soit murée depuis six siècles. Voilà que ces deux frères discutent ici, dans ce coin de cloître d’un tel problème – leur discussion nous est rendue présente. Deus conservat omnia – Dieu garde tout, tout est vie en son Verbe, tout est vivant en son Amour.

Nos choix, heureux ou regrettables, nos quêtes, réussies ou brisées, nos amitiés, épanouies ou ternies – tout cela a de la valeur aux yeux de Dieu, car il pour lui que nous sommes faits. En lui, notre histoire trouve sa source, sa lumière, son achèvement. Nous prions aujourd’hui pour notre frère Paul, Antonin de son nom de religieux, en le confiant à l’amour de Dieu. « Je suis l’alpha et l’oméga, le commencement et la fin. Moi, je donnerai gratuitement à celui qui a soif l’eau de la source de vie: tel sera l’héritage réservé au vainqueur; je serai son Dieu, et il sera mon fils« .

Notre histoire a-t-elle un but? Vers quoi tend-t-elle? Vers cette rencontre ultime qui donne sens à tout ce que nous avons vécu, vers la demeure qui nous est préparée, vers l’amitié qui ne se dément pas. « Jésus lui dit: Moi, je suis le chemin, la vérité, et la vie; nul ne vient au Père que par moi« .