Voici le jour que fit le Seigneur
« Voici le Jour que fit le Seigneur »
C’était après la mort de Jésus, le soir venu, le premier jour de la semaine, les portes du lieu où se trouvaient les disciples étaient verrouillées par crainte des juifs, Jésus vint, il était là au milieu d’eux. Il leur dit : la paix soit avec vous !
En quelques lignes nous est ici résumé le cœur de l’Évangile.
Frères et sœurs, ‘voici le Jour que fit le Seigneur, jour d’allégresse et jour de joie !’ Quel jour étonnant et singulier ce 1er jour, c’est l’unique, le 1er et le 8ème, le jour de la nouvelle création, et des temps nouveaux, le jour où le Christ est ressuscité d’entre les morts et à jamais vivant au milieu de nous. Nous le célébrons liturgiquement depuis 8 jours, et aujourd’hui encore en ce 8ème jour dans l’octave de Pâques.
Le soir de ce 1er jour, nous dit l’évangéliste, les disciples se sont enfermés parce qu’ils ont peur. On peut les comprendre après tout ce qui s’est passé : si on a tué le Maître, on peut aussi tuer ses disciples. Et puis, cette journée de Pâques qu’ils viennent de vivre, a été faite de bouleversements depuis le matin. Des femmes sont venues leur dire que le tombeau où l’on avait déposé le corps de Jésus était vide. Pierre a couru et l’a constaté, le disciple bien-aimé a couru plus vite, il a vu et il a cru. Deux autres disciples en route vers Emmaüs parlent entre eux de tout ce qui s’était passé, des anges avaient bien dit à ces femmes accourues au tombeau que Jésus est vivant mais ils ne les ont pas crues, et lui ils ne l’ont pas vu. Rien n’est venu confirmer la nouvelle, qui n’est peut-être qu’une rumeur. L’espérance est déçue. On va, on vient, on court, on s’interroge, on croit, on doute…
…et le soir on s’enferme, tout craintifs. L’horizon reste sombre comme la nuit qui tombe. Et Jésus était là au milieu d’eux. Qu’importe que tout soit fermé et verrouillé ! on n’enchaîne pas la Parole de Dieu, le Verbe de Vie. Jésus ne connaît ni les murs, ni les verrous, ni la peur. Il ne passe pas à travers les murs, tel un fantôme : l’Évangile nous dit simplement que Jésus est là, au milieu de ses disciples. C’est bien lui. Respectons le mystère de sa présence.
Sa présence est différente, nouvelle, mais bien réelle ; elle confère à l’espace et au temps un poids nouveau d’éternité. Jésus l’avait dit avant sa Passion : Quand je serai parti vous préparer une place, je reviendrai vers vous ; le monde ne me verra plus, mais vous vous me verrez parce que moi je vis et que vous vous vivrez.
C’est ainsi qu’il se manifeste aujourd’hui, en ce 1er jour de la semaine, à ses disciples apeurés. Comme il leur a promis, Jésus revient vers eux alors que leurs portes sont verrouillées et leurs cœurs fermés, il leur montre ses mains et son côté, là où se trouvent ses plaies, les marques de la crucifixion, dont la fraction du pain est le signe sacramentel. La résurrection n’a pas gommé la Passion ni la mort, comme si rien n’était arrivé. Le Christ l’a traversée, il en est sorti vainqueur et il apparaît Vivant au milieu de ses disciples qu’il salue maintenant par ces mots :
La paix soit avec vous. Shalom alekhem ! Jésus leur donne cette paix qui vient de Dieu, offerte comme un cadeau. Après tout ce qui vient de se passer, qu’il a fallu vivre et endurer : la crainte, l’angoisse, les horreurs de la Passion et de la mort ; après les dérobades, reniement et autres trahisons, Jésus s’adresse à ses disciples sans l’ombre d’un reproche, sans culpabilisation aucune, plein de miséricorde, de tendresse et de pardon. Les disciples se découvrent aimés, pardonnés dans la paix qui les investit et les rassemble. La paix soit avec vous. C’est tellement essentiel que nous en faisons mémoire à chaque eucharistie : Seigneur Jésus-Christ, tu as dit à tes apôtres : je vous laisse la paix, je vous donne ma paix.
Les disciples en sont remplis d’une joie profonde et réelle. Ce qui leur arrive est inouï, est très au-delà du pensable, voire du raisonnable.
C’est tellement inouï que l’un d’eux, qui n’était pas là quand Jésus était venu, ne peut croire le témoignage des apôtres. Thomas, qui nous ressemble comme un jumeau, veut vérifier ce qu’on lui raconte, il veut voir lui-même pour croire, il a besoin de preuves concrètes, il veut s’approcher et toucher du doigt la réalité. Et c’est Jésus qui vient à lui et lui ouvre les mains : Vois mes mains, avance ton doigt, avance ta main et cesse d’être incrédule, sois croyant. Et Thomas répond : Mon Seigneur et mon Dieu. ‘Il est grand le mystère de la foi !’ Ce disciple, qui figure à 7 reprises dans le 4ème évangile, est exemplaire par sa profession de foi, il reconnaît l’identité véritable de Jésus, sa puissance et sa gloire, une puissance et une gloire éternellement marquées du signe de la croix.
Les apôtres ont rencontré Jésus ressuscité, ils l’ont vu et ils ont cru. Ils attestent que Jésus est vivant, leur témoignage est véridique. Notre foi repose sur le témoignage des apôtres. Comme nous le dit l’évangéliste Jean, ce qu’ils ont vu, ils l’ont mis par écrit pour que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et pour qu’en croyant vous ayez la vie en son Nom.
Désormais en Jésus-Christ ressuscité la vie nouvelle est commencée, ses disciples vivent comme des frères, mettent tout en commun, ils sont assidus à la communion fraternelle, à la fraction du pain et aux prières. Heureux de croire sans avoir vu, ils font sauter les verrous, chassent la peur qui les habite, et partent en mission annoncer l’Évangile et rendre témoignage de la paix, du pardon, de l’amour de Dieu. Notre monde en a tant besoin.